La
grande richesse de l’affaire de Rennes-le-Château n’est pas tant la recherche
d’un pseudo trésor, d’ordre purement matériel, mais plutôt la quête d’une Connaissance
au travers de tous les documents laissés par nos curés : B. Saunière, H. Boudet
et consort. Même P. Plantard et Ph. de Chérisey, par le Prieuré de Sion de 1956, avec toute
la malice qu’ils reflètent dans leur miroir aux alouettes, ont transmis un fond
de vérité. Nous
avons déjà étudié beaucoup de pièces peu conventionnelles parmi lesquelles le
Codex Bezae, le Bréviaire Romain, des archives d’Hautpoul quasi inédites, la
bibliothèque et la correspondance de Saunière etc. Nous avons ainsi tenté
d’établir le schéma d’une énigme authentique en partant sur des pistes que peu
de chercheurs, voire aucun, ont exploré car ils n’avaient pas les informations
adéquates. Ou, s’ils les avaient, ils les ont exploitées à demi ou plutôt au
quart. Ainsi en est il pour l’hymne d’Odon de Cluny dédiée à Marie
Madeleine (Bréviaire Romain), 186 / XAP et autres détails fracassants
du Codex Bezae, les relations de Saunière avec la famille Stüblein et l’abbé
Boudet (Carnet de correspondances). J’en passe et des meilleurs. Les Dossiers Secrets d’Henri Lobineau Pour
poursuivre cette enquête il faut parfois savoir revenir sur nos pas. Non pas
pour renier nos précédentes affirmations mais toujours dans le but d’avancer afin
de ne pas perdre pied et se noyer dans des conjectures erronées, sans fondement
et éviter toute manipulation. Dans
la présente étude nous allons donc retourner, si toutefois nous nous en étions
éloignés, aux « fondamentaux » de l’histoire de Rennes-le-Château. Le
dossier Lobineau, pièce structurelle du Prieuré de Sion, est à lui seul un
gisement de documents apocryphes à fouiller avec minutie afin d’extirper de
leur gangue les quelques perles pouvant encore s’y trouver. Parmi
les précédentes publications, vous avez pu lire la véritable histoire du château
de Barbarie. Les généalogies des familles
de Saint-Clair, de Gisors et des comtes du Razès ont été remises en ordre.
Autant dire que le montage du Prieuré de 1956 a fait long feu. Aujourd’hui,
nous vous proposons de décortiquer un morceau d’anthologie : le feuillet
titré « Le Hiéron du Val d’Or » daté des 5 février et 26 juin 1926,
dont la source du texte n’a jamais réellement été déterminée avec exactitude.
Or, comme tout se sait un jour ou l’autre, nous
pouvons affirmer avec certitude que le texte imprimé dans le dossier Lobineau
provient du livre de Paul Le Cour « l’Ere du Verseau »[1].
L’idée était connue... comme tout fait marquant l’histoire de
Rennes-le-Château. Cependant, personne encore n’a développé le montage fumeux
du Prieuré. La
première édition de l’Ere du Verseau date de 1937. Beaucoup de
chercheurs, notamment des anglais[2], ont exposé
leur théorie autour de cette édition. Il s’en sont contentés pour faire de P.
Plantard un simple mythomane. A vouloir faire du « scoop » à la
volée, ils ont bâclé leur enquête et parlent de l’édition de 1937 sans l’avoir
lue. Nous le disons à juste titre, vous le verrez plus loin. Plusieurs
éditions revues et augmentées ont suivi en 1942, 1949, 1962, 1971 et quelques
autres jusqu’à maintenant. Afin d’avoir une idée précise du montage, il faut connaître
l’édition utilisée par notre duo de choc pour créer le feuillet suspect.
Le Texte : Nous
nous sommes procuré l’édition originale de 1937 et
celle de 1962. Nous les avons comparées : un vrai travail de philologie.
Il fallait les disséquer dans le détail pour découvrir quel mirifique puzzle P.
Plantard et Ph. de Chérisey se sont ingéniés à inventer et finalement retrouver la bonne
édition. Sans
aucun doute possible, nous pouvons affirmer qu’il s’agit de l’édition de 1962. Pas
moins de dix pages prises de part et d’autre du livre de Paul Le Cour leur ont
servi. Il s’agit des pages : 108, 133, 157, 164, 165, 166, 170, 171, 173
et 178. Aux pages 170 et 171, les notes de bas de page sont reproduites à
l’identique. En voici le détail :
L’iconographie : 1°
L’image du poulpe - À la page 133 nous retrouvons le dessin du Poulpe,
signature iconographique accaparée par P. Plantard et colportée par les
chercheurs anglo-saxons en pensant qu’il s’agissait de l’édition de 1937
(p.135). Le croquis qu’ils exhibent provient de l’édition de 1962. Si les
textes ont été pompés dans l’édition de 1962, les faussaires du Prieuré ont
fait de même avec l’iconographie.
Son
image n’est pas à mettre dans la catégorie des faux. C’est un symbole reconnu,
fort ancien[3]. Il est le symbole sacré
de l’action fécondant l’Océan chez les Grecs, les Scandinaves ou les Hyperboréens
par exemple. Un glyphe du désert de Nasca pourrait
aussi se rapprocher de l’image du céphalopode. C’est celui que l’on nomme l’araignée,
comme le font quelques chercheurs pour le poulpe de Rennes-le-Château (cf. dalle
de la marquise). Nous l’apercevons d’une manière fugitive et stylisée sur la
page de titre du livre de Labouisse-Rochefort « Voyage à
Rennes-les-Bains » en 1832. Ce sont des motifs qui n’ont pas échappé
au Prieuré de Sion de 1956.
Paul
Le Cour était un fervent défenseur du symbolisme du poulpe. En 1927 il en fit une
communication, publiée dans le Mercure de France[4] (fig. a, b, c, d, e). Il l’évoquait encore dans le n°19 de sa revue Atlantis
de 1929 : numéro consacré, comme par hasard, au Hiéron du Val d’Or. 2°
L’amulette égyptienne (du musée de Rennes) - Elle a été également
empruntée à la page 165 du même ouvrage de P. Le Cour, édition de 1962. Quand
on compare sa mise en page et celle du document émis par le Prieuré de Sion,
sur deux colonnes, on constate que la méthode employée est la photocopie
réduite de moitié. Les photocopieuses étaient accessibles en 1965. La méthode
n’a pas été utilisée pour « Pierres Gravées du Languedoc ». C’est
pourquoi nous sommes certains que le Prieuré de Sion ne pouvait être l’auteur
de la plaquette de Stüblein
Il
existe une autre amulette du même style parue dans la revue Atlantis
n°19 de 1926. Celle-ci serait au musée Borelly de Marseille.
Pour
fabriquer son faux document vers 1965, le Prieuré de Sion de 1956 a donc utilisé
la plus récente édition qu’il avait à portée de mains, la plus complète, soit
celle de 1962. Le texte est le même dans toutes les éditions, seule la
pagination diverge. Les mises à jour des différentes éditions n’ont que peu de
poids car les faussaires ont pris soin de choisir des passages achroniques (c’est-à-dire ne tenant pas compte du temps). Quant
à la mise en page, elle a été empruntée très certainement à la revue « le
Magasin Pittoresque » pour égarer le chercheur un peu trop curieux. On
peut se tourner également vers la revue Atlantis qui a une pagination
similaire. Ici, on a le choix des publications. On
reconnaît dans ce montage le système adopté pour confectionner l’opuscule « un
Trésor mérovingien à Rennes-le-Château » d’A l’Ermite. Le matériel
littéraire provient du livre de R. Charroux « Trésors du Monde »[5]. Tous
les documents du Prieuré à l’usage des auteurs depuis des décennies sont
truqués. Cela, tout le monde le sait. Malgré tout, dans le cadre du Hiéron du
Val d’Or, c’est tout à fait particulier. Trois éléments nous aideront à prouver
que la société discrète joua un rôle déterminant dans la vie de l’abbé
Saunière. Il s’agit de sa pensée idéologique, des travaux réalisés dans son
domaine et de ses carnets de correspondances que nous étudions depuis 2005.
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