On purge l’abbé Depuis
plusieurs mois maintenant, les investigations entreprises autour de l’énigme de
Rennes-le-Château deviennent une science exacte. Outre le codex bezae, source authentique et
inépuisable d’informations dont nous poursuivons l’étude, d’autres documents de
référence ne sont plus à écarter et nous font voyager. Nous publions, depuis peu, certaines de ces pièces essentielles à l'affaire dans notre nouveau magazine d'investigations le Mercure de Gaillon. Les voyages forment la jeunesse, nous a-t-on appris. Mais ils développent surtout le sens critique et l'objectivité, ce dont quelques commentateurs bien attentionnés manquent sérieusement.
Ces
documents ont été mis à la disposition des chercheurs, pendant un temps,
moyennant une somme de 53 € (port inclus), se présentant au premier abord comme
une masse de photocopies désordonnées, pour un tiers inexploitables car
illisibles, quand les feuillets ne sont pas manquants… Il faut passer un grand
nombre d’heures à trier et classer ces feuillets avant de pouvoir étudier
chaque page une à une : un décryptage minutieux, à la loupe, de l’écriture de
B. Saunière. C’était
un travail ingrat, mais il fallait le faire. Une liasse de factures, de lettres
et autres documents provenant des archives de l’abbé[1] nous a
servi à croiser plusieurs informations consignées dans les carnets. De
ses relations avec Henri Boudet, curé de Rennes-les-Bains, aux contacts
parisiens qu’il avait, en passant par Lyon, ville étape obligatoire à bien des
égards, la vie du curé de Rennes-le-Château n’est pas un long fleuve
tranquille. Nous en apporterons les preuves. A
des années lumières des discours timorés des chercheurs ne voyant pas plus loin
que le bout de leur nez, nous franchissons le pas des hypothèses en donnant des
indications précises et précieuses ayant été écartées, voire censurées, on ne
sait trop pour quelle raison. Il
faut dire que notre enquête taille en pièces les idées saugrenues, souvent
tordues, du trafic de messes ou du pillage de troncs, martelées sans aucune
preuve valable par une armée de rationalistes visant à faire de l’abbé Saunière
un voleur, alcoolique et antisémite. La diffamation est l’arme des faibles et
de ceux qui n’ont rien d’autre à dire. Ici,
nous ne parlerons pas des carnets de comptes, trop incomplets[2] et
fabriqués à la hâte, par l’abbé Saunière, pour la circonstance de son procès
pour trafic de messes, qui, rappelons-le, n’a jamais été prouvé. Il suffit de
comparer certaines facturations (ex : abonnements aux revues) pour
s’apercevoir que sa comptabilité est fausse. La
correspondance nous a servi dernièrement à établir un inventaire estimatif de la
bibliothèque de notre curé. Bibliothèque détenant d’ailleurs quelques pièces
curieuses et de qualité, quoiqu’en disent nos détracteurs. De ses liens avec Henri Boudet Après
avoir épluché sa bibliothèque, il nous a paru bon de connaître les véritables
relations l’unissant à l’abbé H. Boudet, parmi d’autres correspondants. Là
encore ses carnets de correspondances nous instruisent. On
tente de nous faire croire depuis des mois qu’aucun rapport amical n’existait
entre eux. C’est évidemment un mensonge éhonté et nous persistons dans nos
affirmations depuis la parution de notre ouvrage Arcana Codex Livre II
en 2006, dans lequel nous avons étudié une partie, certes succincte, mais importante,
des carnets de correspondances. La
relation entre les deux prêtres auraient été tendues vers 1896. Une brouille
aurait surgi entre les deux prêtres. Les carnets de Saunière ne disent pas
cela. Rien ne peut témoigner de telles affirmations. Bien au contraire,
l’entente entre les deux hommes était parfaite, au moins jusqu’en 1909, ainsi
que nous l’indiquent un quinzaine d’échanges de courriers entre janvier 1897 et
octobre 1909. Si tant est que Saunière notait au jour le jour tous ses
courriers. Leurs communications ne se limitaient pas
essentiellement à des demandes et des envois de messes. Il y a un courrier où
B. Saunière ne mentionne qu’un accusé de réception, pourquoi ? Pas de
trace de la lettre de Boudet en émission. Un courrier du 25 mars 1900 atteste de leurs rapports
financiers. Boudet lui envoie des messes, donc de l’argent : accusé de
réception le lendemain de la part de Saunière. Cela ne signifie pas pour autant
un financement important et permanent. Boudet n’était pas un mécène pour
Saunière, c’était un comparse. Nous le voyons ainsi, simplement. Une lettre du 13 mai 1907 témoigne de leurs liens
amicaux. H. Boudet envoie le faire-part de décès de son frère Edmond, notaire à
Axat et auteur des gravures et de la carte de la Rennes Celtique publiée dans la vraie langue celtique,
décédé le 5 mai. Respectueusement, B. Saunière enverra ses condoléances le
lendemain. ![]() Enfin le 14 juillet 1907, B. Saunière contacte H.
Boudet pour lui signaler qu’il avait écrit trois lettres à l’abbé Gachen, curé
de St Jean de Paracol. Nous voyons mal de tels échanges entre deux personnes
se détestant aussi cordialement comme le prétend la légende. Non seulement ils
ne se méprisaient pas mais ils avaient les mêmes relations parisiennes : la famille
duvaux, pour ne citer qu’elle. ![]() On se souviendra en effet de l'introduction d’Henri Boudet
au sein de la Société de Linguistique de Paris le 20 novembre 1897 coopté par
Louis Duvau (ci-contre). Celui-ci décédera le 14 juillet 1903 à l’âge de 39 ans. Le 23 mars
1904, M. et Mme Duvaux, probables parents du défunt, enverront une demande de
messe à célébrer à l’abbé Saunière (ci-dessous). Il en existe beaucoup d’autres au cours des
années suivantes. Ses correspondances en font foi. Même si cela reste au stade
de l’hypothèse, il n’y a aucune raison de l’écarter. L’orthographe du nom, en
apparence différente, n’est pas une valeur objective pour repousser cette
famille. Chacun sait qu’il n’y a jamais de faute dans un patronyme, une erreur
de B. Saunière n’étant pas à exclure. Les écrits de Saunière sont difficilement
identifiables sur certaines pages. Il nous a été toutefois possible de
restituer les caractères effacés. ![]() Notre dernier argument en faveur des relations Boudet /Saunière
ne se limitera pas à ces quelques échanges épistolaires. Peut-on réellement
imaginer deux prêtres, vivant à moins de 5 km l’un de l’autre, n’ayant aucun
contact ? Il faut être réaliste. A cette époque chaque bourgade avait son
curé et tous se connaissaient (Cf. carnet d'adresses). Des liens avec le beau monde A la lecture du registre de correspondances de l’abbé
Saunière un premier constat s’impose : il ne s’agit absolument pas d’un
report rigoureux de tous ses courriers émis ou reçus, rédigés sur 20 ans de
ministère. Pour conforter notre raisonnement, nous prendrons en exemple le
décès de Mgr F.-A. Billard qui n’est en aucune façon mentionnée dans ces pages.
Rappelons-nous de sa mort au monastère de Prouille le 3 décembre 1901. Comment se peut-il qu’au début décembre 1901 B.
Saunière ne reçoive pas de faire-part de décès de son archevêque ? Même s’il
n’y avait pas de relations étroites entre ces deux hommes d’Eglise, rien ne
justifie ce manquement ! Excepté si l’on considère une omission de
Saunière dans ses carnets. Elle ne fut pas la seule (cf. accusé de
réception Saunière/Boudet). Fort de cette constatation, rien ne s’oppose à l’idée
de rapprochements entre divers personnages protagonistes de l’affaire du
présumé thrésor : Jules Bois, la famille de Habsbourg ou Emma Calvé, la
cantatrice. Toutes objections retenues, nous remarquons qu’en date
du 15 novembre 1897 B. Saunière envoie une demande de messe à un certain Calvet,
sans autre indication. En 1906, Emile Calvet correspond encore avec lui. Notre second constat suit de très près ce que nous
venons de dire; des noms de familles connues naviguant dans les eaux
sulfureuses de l’affaire sont inscrits dans les carnets de B. Saunière. Le nom
de Paul roche notaire à Arques de
1873 à 1906 et père de Déodat Roché le chantre Cathare, apparaît dans les
courriers de Saunière. Les noms de calvet
à Mérial et particulièrement celui de stüblein à Alet
sont mentionnés à notre plus grande stupéfaction. Enorme et fantastique à la fois. Au grand dam des
pourfendeurs de l’énigme du curé aux milliards et de la tombe de Marie de Négri
d’Ables, Bérenger Saunière était en relation d’affaires avec Emile stüblein, frère d’Eugène Stüblein le prétendu
auteur de « pierres gravées du Languedoc », un des documents
piliers de l’affaire.
Emile était un pseudonyme. Pour l’état-civil, il
restait Charles Louis Hector Stüblein. Il fut instituteur adjoint à l’école
laïque de la ville de Narbonne. Il y résida jusqu’à son mariage avec Marie-Louise
Philippine de Peyre à Alet-les-Bains, célébré le 28 janvier 1866, sous les bons
auspices du maire de la commune Auguste Saunière. Il poursuivit ses
fonctions de maître adjoint à Alet. Puis il exerça la profession d’agent
général d’assurances après avoir interrompu sa carrière d’enseignant. Il décède
le 23 mars 1910 dans la petite ville thermale qui l’avait adopté. Entre temps en 1879, B. Saunière avait débuté son
sacerdoce en tant que vicaire dans l’ancien archevêché. Les deux hommes
avaient-ils noué quelques liens dès cette époque ? C’est ainsi que l’on découvre B. Saunière contractant
une assurance en 1903. Dans une lettre en date du 16 mars, il demande à E.
Stüblein de renouveler l’assurance… (le reste
du libellé est illisible). Le 3 novembre de la même année Stüblein lui envoie
des imprimés… (le reste est illisible). ![]() Ces nouvelles informations permettent de regarder sous
un nouveau jour le livret Pierres gravées du Languedoc, dont la
rédaction est attribuée à Eugène Stüblein, et la
dalle mortuaire de Marie de Negri d’Ables[3]. Il a
vécu quelques temps à Alet. En 1865, il y enseignait encore à l’école publique.
Un financement occulte ? L’abbé Saunière n’a jamais trouvé de trésor matériel. Il
devient de plus en plus évident qu’il fut payé pour retrouver et garder un
Thrésor d’ordre plus spirituel. Des individus, mettant en avant des billets de la Loterie
Hongroise, ont cherché à ternir sa réputation en faisant croire qu’il était
un traître à son pays à la solde des autrichiens. Certes en 1908 (7 nov), il reçoit des lots de la Loterie
Hongroise. Faut-il entendre autre chose derrière ce libellé ? A cette
époque les billets de loterie étaient distribués par les banques. D’ailleurs on
le voit correspondre avec des banques tant hongroises qu’espagnoles, et il y en
a même des françaises... étonnant non ! Le Crédit Foncier de Paris, en particulier, lui fera
parvenir des sommes d’argent assez conséquentes. En 1911, par exemple, entre le 12 et 14 mars, il reçoit 6
000 F de cette banque. Ce qui fera dire à certains qu’il contractait des crédits.
Le seul souci dans cette affirmation, c’est qu’il n’y a aucune trace écrite
d’un présumé contrat de crédit au nom de B. Saunière, ni à celui de Marie Denarnaud. L’abbé n’a jamais manqué d’argent, c’est certain. On a
estimé depuis longtemps ses revenus sacerdotaux. Il percevait son traitement et
le revenu des messes, reçus de partout en France : de congrégations
religieuses, monastères, mais aussi d’hospices, hôpitaux civils et militaires,
d’écoles privées et militaires ou de particuliers. Pas de quoi fouetter un chat
en vérité. Dans l’Eure par exemple, il avait envoyé des demandes de
messes à l’école militaire de Andelys, à l’hospice de Gisors (1899), à
Etrepagny, à Louviers, à Bernay ou à Evreux (ci-dessous). Il pratiquait ce type de
correspondance fréquemment dans tous les départements. C’était une partie de
ses revenus, pas autre chose. Vient s’ajouter à cela son commerce de cartes
postales. Néanmoins, cette mâne est insuffisante pour expliquer ses dépenses excessives. Parmi les congrégations religieuses y en avait-il qui
le sponsorisaient plus que d’autres ? Il y aurait matière à réflexion.
N’ayant que la moitié des carnets nous ne pouvons pas nous prononcer de manière
catégorique. Nous pointerons toutefois les nombreux échanges entre Bérenger
Saunière et la sœur Terris du 140 de la rue du Bac[4] à Paris, adresse
de la Chapelle de la Médaille Miraculeuse et du Séminaire des
Missions Etrangères ayant des relations étroites avec les A.A[5]. Emule de la Compagnie du Saint-Sacrement, l’A.A de Paris (parmi d’autres) avait effectivement des liens
avec le séminaire des Missions Etrangères[6]. D’ailleurs,
c’est par les archives des Missions Etrangères de Paris que l’on connaît
l’existence des A.A. Or la création du Séminaire est une initiative de la
Compagnie[7]. Il a été fondé en 1637 par Mgr Raconis, évêque de Lavaur[8], tout
d’abord sous le titre d’Exaltation de la Sainte-Croix. Chaque année
l’établissement devait payer un écu d’or au curé de Saint-Sulpice de Paris. En
1645, Jean-Jacques Olier, dont les liens avec la Compagnie du Saint-Sacrement
ne sont plus à démontrer, était curé de cette église. A la Révolution, les
revenus du Séminaire des Missions Etrangères s’élevaient à environ 117 787
livres et ses charges à 53 718 livres. Après les années de Terreur, le
Séminaire reprit de plus belle ses activités. Les sommes perçues par l’abbé en provenance de la rue
du Bac sont courantes. Elles se fondent
dans les carnets de comptes. Tant et si bien qu’il nous a été impossible de
savoir combien lui a versé la sœur Terris pour des messes, parait-il, ou bien
autre chose. De fait, nous suspectons l’abbé d’avoir été l’émissaire ou le
missionnaire de congrégations cherchant à découvrir des secrets, plus ou moins
spirituels, perdus depuis la Haute-Antiquité. Suspicions partagées, ou inavouées, même en son temps,
puisque à la date du 30 novembre 1909, il reçoit une lettre d’un anonyme de
Bugarach lui donnant... un conseil au sujet de l’argent (ci-dessous). On ne saura
jamais lequel ! ![]() Des détails sans importances ?
Les carnets de correspondances sont d’une telle
richesse qu’il nous a paru inconcevable d’éviter d’autres sujets qui fâchent. A
commencer par la présumée présence à Lyon de B. Saunière. Ici, comme dans
toutes les grandes villes de France, l’abbé avait ses contacts réguliers[9]. Or
plus qu’ailleurs, on y décèle des échanges particuliers allant au-delà d’une
demande de messes. Dès 1898, B. Saunière sera engagé dans un procès pour
non présentation des comptes de la fabrique de l’église de Rennes-le-Château[10] de
l’année 1897, à la cour des comptes de Paris. Plusieurs courriers sont notifiés
avec le « Comité de Lyon » cette même année pour cette affaire. En 1908 (11 nov) il enverra à Lyon un document
venant de la préfecture (?) à Paul Villard, conseiller ou avocat de cette
ville. D’autres échanges ont lieu le même mois avec la même personne. Mais le plus important est de prouver qu’il pouvait
être physiquement à Lyon. Indéniable fait réfuté en bloc par la cohorte des
détracteurs, et ce, malgré un certain nombre de justificatifs authentiques
publiés sur d’autres canaux du web. Nous en ajouterons un nouveau, tout aussi irréfutable,
pioché dans les correspondances. Oui ! Bérenger Saunière avait des biens
immobiliers à Lyon en 1912. En voici la preuve magistrale : le 22 avril
1912, P. Villard lui envoie deux feuilles des contributions. Par
« contributions » on entend généralement « impôts ».
Th. Garnier © 20 mars 2008 - M2G éditions. Toute reproduction interdite sans autorisation de l'auteur. Remerciements particuliers
à : A-M Lecordier
[1] Archives de
Bérenger Saunière, rassemblées par P. Jarnac, Coll. Ocre, 1984. L’héritage de
l’abbé Saunière, par C. Corbu et A. Captier, éd. Bélisane, 1985. [2] Tels sont ceux
que nous avons reçus. [4] Cf.
correspondance du 2 février 1910, entres autres. [5] Assemblées des
bons Amis. [6] Cf. article du père Cavallera
dans le Bulletin Littéraire Ecclésiastique (B.L.E.) en 1933-1934. [8] Pour mémoire
nous citerons la seigneurie d’Auxillon, fief de la
famille Hautpoul-Felines dans le diocèse de Lavaur. [9] Arcana Codex L. II, Th Garnier, M2G
Editions, 2006, p.84. [10] Op. cit, C. Corbu
et A. Captier, p.114. |